lundi 3 septembre 2007

Etre ou ne pas être glamour, telle n'est plus la question: une histoire de paupiettes

Un certain Vincent D. m'avait dit il y a longtemps déjà, quelque chose comme "Ce livre de Valérie M., c'est pas mal du tout, mais c'est quand même un peu friqué, genre on-va-s'acheter-des-macarons-à-la-pistache". J'avais aussi appris, par la lecture attentive d'un article que j'avais consciencieusement découpé (et que j'avais même affiché au-dessus de mon poste de téléphone, à côté d'une photo de Anna Mouglalis, dans un vieil appartement où j'aimais, pour le goûter, dévorer de larges tartines recouvertes de beurre salé et de gelée de mûres) que ce jeune homme trouvait que les repas étaient une perte de temps, ce qui corroborait une autre rumeur lue dans un magazine plus branché selon laquelle notre jeune homme brun recevait ses invités autour de pâtes aux knackis (ce qui est effectivement moins ruineux qu'une assiette de macarons à la pistache, même si en étant un peu habile, patient et équipé, on peut visiblement en faire soi-même). Bon, de toute façon, il nous avait prévenus, il aime à dîner aux chandelles de jambon-purée chez des filles qui ont du thé à la vanille (ce qui n'est plus mon cas, j'engloutis en ce moment des litres de thé vert à la fleur de cerisier) ce qui est une révélation des plus rassurante: alors, un dîner glamour ne consiste pas forcément à servir des huîtres panées au gingembre ou des ravioles de langoustes pochées dans un bouillon à la citronnelle. Une purée peut aussi faire son petit effet.
Tout ça pour dire qu'un jour, j'ai voulu faire des paupiettes pour faire plaisir à G. (parce que je lui avais promis, lors d'un long trajet en voiture, que si Ségolène R. remportait les présidentielles, alors je ferai des paupiettes et peut-être même, je nettoierai les grandes baies vitrées du salon qui auraient fait s'évanouir n'importe quel obsessionnel en goguette. Et oui, notre vie peut parfois être bien triviale, on n'est pas tout le temps en train de regarder des films scandinaves ou de lire des revues de psychanalyse, il nous arrive aussi de faire le ménage...) Ainsi, comme il est arrivé ce que l'on sait, il n'avait jamais pu goûter à des paupiettes faites par mes soins et j'ai fini par trouver ça ridicule de le priver d'un tel plaisir juste parce que des gens aux idées différentes et pas forcément très recommandables avaient préféré un type populiste, hypocrite et malsain (et j'ai même fait les vitres!). Alors c'est vrai, les paupiettes c'est pas très glamour, ça fait même petite mamie en blouse à fleurs, mais il faut croire que ça ne me déplaît pas puisque j'étais toute contente d'acheter de la ficelle à rôti au petit rayon cuisine du Monop, ça faisait sérieux (ok, j'aurais pu demander de la ficelle au boucher mais il est moustachu et m'intimide un peu). Toujours est-il que lorsque j'ai cherché sur internet une recette de paupiettes, je me suis aperçue de deux choses: d'abord que la plupart des gens les achetaient toutes prêtes (alors que moi ce que je voulais, c'était faire moi-même ces petits oreillers, et puis faire les noeuds, comme au bloc) et surtout qu'il n'existait pas de dogme évangélistique quant à leur contenu. En gros, on peut y mettre ce qu'on veut, en espérant que tout ira bien ensemble (je vous ai déjà parlé de cette histoire de camembert au kinder qui m'avait enseigné que trop de bon tue le bon). Un peu comme Sonia Ezgulian qui raconte dans ce delicieux livre qu'elle adore se défouler du stress d'une journée de travail en se vengeant sur des carottes (coupées en brunoise, en julienne, râpées, mixées...), j'ai trouvé aussi apaisant qu'une séance de yoga (enfin, je n'en ai jamais fait mais je lui imagine cet effet-là) de préparer la farce puis de former les petites paupiettes avec cette fameuse ficelle à rôti. Elles étaient parfumées et délicieuses, notre petite patoumamie en blouse fleurie était ravie.

Les paupiettes de patoumamie
Pour deux personnes

Alors, les proportions sont approximatives parce qu'emportée dans mon élan, je n'ai rien noté. En même temps, il me semble compliqué de donner une recette universelle pour un plat aussi polymorphe (c'est comme les tomates farcies, chacun à sa petite recette)

-4 escalopes de veau très très fines (insister, même si le boucher est moustachu)
-de la chair à saucisse
-de l'ail, un oignon, du persil plat
-un oeuf
-du jambon cru haché
-du parmesan
-un peu de sirop d'érable, un peu de poivre

-des carottes et un oignon en petits dés
-de la pancetta en petits dés
-du vin blanc
-de l'huile d'olive

Mélanger tous les ingrédients de la farce.
Façonner vos paupiettes comme votre bon sens vous l'indique (comme je suis dépourvue de sens pratique et que j'ai réussi, je pense que ça ne devrait pas vous poser de problèmes. En fait, j'ai retaillé les escalopes en grands triangles isocèles et j'ai haché les chutes que j'ai ajoutées à la farce).
Les faire revenir sur tous les côtés avec de l'huile d'olive dans une cocotte qui passe au four.
Les retirer, les garder au chaud, jeter l'huile.
Faire revenir dans la même cocotte les dés de carotte, d'oignons et de pancetta.
Déglacer avec le vin blanc, rajouter les paupiettes, couvrir et faire cuire assez longtemps dans un four à température modérée.
Servir avec une jolie purée au beurre salé.

Sur une étagère poussiéreuse de ma bibliothèque d'adolescente, dans la chambre rose et verte de la maison de mes parents, j'ai retrouvé le weekend dernier, outre un très joli livre de nouvelles britanniques que j'avais lues pour le cours d'anglais de l'hypokhâgne que j'ai désertée, un petit album vert datant de 1958 et s'adressant aux "jeunes mariées tremblantes et aux ménagères cuites et recuites à la chaleur de leur four". Bonne cuisine et jolis plats suggère ainsi aux femmes blasées ou débutantes de régaler leurs invités de Colin à la duchesse (la pauvre!) en gelée ou de langue de veau printanière, utilisant pour les séduire des photos à l'esthétisme au mieux discutable, au pire franchement émétisant. Etre glamour et appétissant, c'est toute une histoire.
Pour en finir avec ce billet décousu que je vous remercie d'avoir lu jusqu'au bout tant on sent qu'il est laborieux, le petit cahier madame Mo offert par G. après une grande semaine de travail et que j'adore.

18 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Elle assure patoumamie je trouve, glamour ou pas on s'en fout si c'est bon !

03 septembre, 2007 16:42  
Anonymous Anonyme said...

Mais, comme sporadiquement, l'orange, l'imprimé léopard, le velours, le mélaminé, l'ail et la betterave redeviennent tout à fait tendance, tu as peut-être juste un peu d'avance.
Bref, tu es tout à fait hype avec tes paupiettes. Et puis Vanessa Bruno ne jure que par les blouses à imprimé fleurs.
Les retardataires n'ont qu'à bien se tenir !

03 septembre, 2007 18:18  
Anonymous Anonyme said...

Bon, les paupiettes c'est pas trop mon truc mais comme je suis patoumaniaque, j'adhère, rien que pour le style, le ton, la conception de la cuisine, aussi. Et de la vie, surtout!

Caluski,

Lisanka

03 septembre, 2007 18:51  
Anonymous Anonyme said...

Chouette un blog de cuisine engagé! Les paupiettes de V. n'en sont que plus appétissantes...

03 septembre, 2007 20:26  
Blogger Alhya said...

j'adore te lire, ça me manquait, et je rêve depuis fort longtemps de faire des paupiettes, si, si, je t'assure! je n'en rajoute même pas! et je vais même tester l'amour de mon boucher qui n'est pas moustachu mais pourrait l'être pour la peine!

03 septembre, 2007 21:12  
Blogger Elvira said...

Comment ça, pas glamour, la paupiette...? Quand j'ai connu celui qui allait devenir mon mari (et qui l'est toujours...), j'étais une espèce de pouffe genre "attachée de presse qui travaille pour un gars important et qui voyage tout le temps". Ben... la première fois que je lui ai fait à manger, c'était des paupiettes, cuisinées avec amour dans son joli appart parisien à lui (j'avais fait le voyage depuis Lisbonne presque exprès, faut dire...). Et il a adoré! Tu crois que c'est le contraste cuisine de mémé-super woman qui l'a séduit...? À l'époque, j'avais aussi du thé à la vanille dans mes placards... Mais maintenant, seulement du vert très pur, de Chine... ;-)

03 septembre, 2007 22:40  
Blogger annie dedicacessen said...

Tu vois, je passais, de temps en temps... et je n'osais pas trop laisser de commentaires. Là, j'ai eu un peu plus de temps et je dois te dire que j'ai lu trois ou quatre billets de toi et que tu m'as fait oubliée la rentrée. C'est juste incroyable, il y a une semaine que j'en tremble. Là, ma fille dort encore et rêve sûrement que j'arrête un peu d'angoisser en préparant des petits pains au lait. Elle pourrait rêver aussi de ce blog. Il s'en dégage une petite musique si pure et douce, c'est vraiment très beau. Je crois que je suis chipée. Je crois même que tu va figurer de suite au revers de veston d'un blog moribond.

Bonne journée Patoumi et merci.

04 septembre, 2007 06:23  
Blogger Estelle Tracy said...

J'avais moi aussi lu cet article sur Vincent D. et j'avais été plus que déçu par le personnage... Y'en a qui passent à côté des meilleures choses de la vie !

04 septembre, 2007 16:50  
Anonymous Anonyme said...

Avec un style d'écriture comme le tien, la paupiette devient poétique, et la poésie, gourmande, bravo!

05 septembre, 2007 09:21  
Blogger lena sous le figuier said...

Tes paupiettes sont les plus glam jamais vues! Je suis sûre que Celui qu'on voit partout, adorerait ;)

Mais ton plat de ménage revisité plaira ici aussi.

05 septembre, 2007 15:10  
Blogger Mingoumango (La Mangue) said...

Glamour ou pas, cela m'est fichtrement égal. L'essentiel est que ce soit appétissant !
Je crois que nous avons en commun beaucoup de produits de chez H. (assiettes, baguettes, etc), sans compter le coup de coeur pour les mugs Penguin ;-)
Bisous itou.

05 septembre, 2007 19:12  
Anonymous Anonyme said...

C'est la cantine qui a rendu pour moi la paupiette totalement anérotique. Et à côté de celles dont je me souviens, les tiennes sont jolies, mignonnes et surtout fort appétissantes. Je crois que tu viens de me réconcilier avec la paupiette. Merci! Bisous.

05 septembre, 2007 21:17  
Blogger Babeth said...

mais si les paupiettes c'est bons mais pas a la cantine! ;-)

06 septembre, 2007 09:00  
Blogger Gracianne said...

Patoumamie :) Et les petits noeuds comme au bloc. Les stages en chirurgie menent a tout.
Moi je m'en fout du glamour, et j'adore les paupiettes. Rien que le nom du plat d'abord.
Mais si on te lit jusqu'au bout, toujours.

06 septembre, 2007 10:13  
Anonymous Anonyme said...

ce plat est parfait pour le froid qui est déjà au portes..

07 septembre, 2007 08:08  
Blogger Marmitedecathy said...

Moi j'adore les paupiettes que je trouve très très glamours, et surtout je les trouve réconfortantes, et tu sais après le résultat que l'on sait, on a vraiment besoin de réconfort

07 septembre, 2007 13:29  
Anonymous Anonyme said...

Glamour ou pas, les paupiettes c'est ce que j'ai demandé à ma mère de me faire à manger la dernière fois que je suis rentrée à la maison. Sauf que chez nous on est anti chair à saucisse alors on fait sans, enfin, elle fait sans car je ne m'y suis jamais mise... Du coup c'est peut etre pas des vraies paupiettes mais c'est tout aussi trop bon :)

07 septembre, 2007 18:04  
Anonymous Anonyme said...

(Moi aussi j'ai peur de mon boucher moustachu... je n'ai jamais su si c'était à cause de la moustache ou de l'immense couteau acéré !)
Eh ben, tu sais quoi ? Tes paupiettes, elles sont chouettes ! T'es une super patoumamie ;-)

09 septembre, 2007 09:55  

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